Chapitre 7 : La maison souterraine
Le lendemain matin, la première chose que Peter doit faire est de mesurer Wendy et ses frères afin de leur trouver des arbres creux. Peter est en effet persuadé qu’ils seront plus en sécurité dans la maison souterraine. Trouver un arbre qui corresponde exactement aux mesures des enfants n’est pas chose facile. Pour Wendy et Michaël, il n’y a aucun problème. Celui de John, par contre doit être légèrement modifié. La technique pour descendre et remonter est assez simple ; dès qu’on s’installe dans le tronc, on retient sa respiration et on descend à une vitesse raisonnable. Pour remonter, les choses sont un peu plus compliquées. Il faut expirer et inspirer alternativement tout en se contorsionnant. Au bout de trois jours, ils ont tous acquis la technique et peuvent entrer et sortir sans difficulté.
Ils aiment beaucoup leur nouvelle maison ; surtout Wendy. Elle est pourtant fort simple, composée d’une seule pièce. Sur le sol, poussent des champignons trapus qui servent de tabourets. Au centre de la pièce, c’est un arbre imaginaire qui essaye de pousser. Il est scié chaque matin de sorte qu’il retrouve juste la bonne taille pour le goûter où il est couvert d’une porte qui sert de plateau. Il est ensuite de nouveau scié pour permettre aux enfants de jouer. Il y a aussi une immense cheminée qui permet de sécher le linge. Le dernier élément de mobilier est un lit qui est rabattu la journée, ouvert chaque soir à 6 heures et demie et dans lequel les enfants dorment tous ensemble. Tous les garçons y dorment à l’exception de Michaël que Wendy considère comme son bébé et qui dort dans un panier suspendu.
Dans le mur, il y a une niche, guère plus grande qu’une cage d’oiseau. C’est l’appartement de Clochette. Personne n’aurait pu rêver à un endroit aussi exquis. Il est séparé du reste de la pièce par un rideau léger et est aménagé avec de superbes tapis, un chandelier et du mobilier de prix qui donne à l’ensemble un air prétentieux et vieillot.
Wendy dans ses nouvelles attributions, n’a plus une seconde à elle. Il faut faire la cuisine, coudre, raccommoder et raconter des histoires aux enfants en sorte que les semaines passent et qu’elle trouve à peine le temps de remonter prendre l’air ou alors seulement accompagnée de son ouvrage. Elle songe parfois à ses parents et est certaine qu’ils ont laissé la fenêtre de la chambre ouverte pour leur retour. Ce qui la chagrine surtout, c’est que John ne se souvient que vaguement de ses parents et que Michaël a fini par la considérer comme sa vraie mère. Pour graver le souvenir dans leurs mémoires, elle les soumet à des interrogations écrites sur ce sujet. Les résultats ne sont guère brillants mais tous les enfants y participent, sauf Peter qui s’estime bien au-dessus de ces enfantillages. Il faut dire que Peter ne sait ni lire, ni écrire.
Peter, pour passer le temps, a inventé un nouveau jeu. Il se livre aux activités que John et Michaël avaient pratiqué jusqu’alors durant leur vie : il reste assis sur un tabouret sans bouger, il lance une balle en l’air, il sort se promener et rentre sans voir tué grand chose d’autre qu’un grizzly. Bien entendu, Peter oblige tout le monde à être ravi de cette nouvelle activité. Au bout de quelques jours, ce jeu ne lui plaît plus et il part seul à l’aventure. Sont-elles réelles ou imaginaires les aventures qu’il dit avoir vécues ? Nul ne le sait. Certaines le sont, du moins en partie, puisque les enfants les ont également vécues. Les raconter toutes prendrait cependant bien trop de temps et d’espace. C’est pourquoi nous devrons nous limiter à quelques hauts faits de la vie sur l’île.
Il y a la bataille sanguinaire contre les indiens au cours de laquelle Peter a subitement décidé de changer de camp et de devenir Peau-Rouge : le combat aurait tourné court si les vrais Peaux-Rouges n’avaient décidé à leur tour d’inverser les rôles et d’être, pour cette fois, les enfants perdus.
Il y a l’histoire où les Peaux-Rouges ont attaqué la maison souterraine : ils sont restés coincés dans les troncs d’arbre creux et i l a fallu les extraire comme des bouchons.
Celle où Peter a délivré, dans la lagune aux sirènes, Lis Tigré, la jolie princesse indienne tombée aux mains des pirates.
Celle où Crochet a trébuché sur le gâteau au sucre vert qu’il avait déposé pour les enfants mais que Wendy arrivait toujours à leur ôter des mains au dernier moment.
Il y a aussi celle de l’oiseau imaginaire qui avait bâti son nid sur une branche d’arbre surplombant la lagune. Le nid est tombé à l’eau et Peter a exigé qu’on laisse l’oiseau tranquille pour couver.
Il y a celle où Clochette et les autres fées ont trouvé Wendy endormie sur une feuille et ont essayé de la chasser de l’île. Heureusement la feuille a cédé et Wendy est revenue sur le rivage à la nage.
Celle où Peter a défié les lions et où aucun de ceux-ci n’a osé traverser un cercle tracé par Peter sur le sol.
Laquelle choisir ? Le mieux est de tirer au sort ... C’est fait et ce sera ... la lagune aux sirènes !
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